
Sébastien Tellier: l’incroyable vérité enfin révélée
Texte et photos: Sébastien Grisey
Pour le simple mortel que je suis, rencontrer une divinité en personne est toujours un peu stressant. Ma petite carrière de photographe de musiciens m’a parfois amenée à tirer le portrait de vedettes mais Sébastien Tellier, grand gourou de l’alliance bleue, puisque c’est de lui dont il s’agit, est un cas à part. Y a-t-il plus insaisissable que cet être constitué à plus de 75% de poils et dont le cœur est si gros qu’il semble prêt à faire exploser une cage thoracique clairement sur les traces de celle de notre Gérard national ?
Insaisissable c’est ce qu’inspire le personnage. Clown ou poète ? Imposteur ou vrai dingo ? Le public s’interroge et pas certain que lui-même le sache. Sa musique est riche, sa musique est belle, sa musique est vraie, trop peut-être pour qu’il choisisse par pudeur de mettre en avant les fanfreluches et les biscuits les plus sucrés de son escarcelle. Mais si l’on fait l’effort de remonter le temps de sa discographie, derrière les lunettes noires, la garde robe neo-on-ne-sait-pas-trop, les cheveux en serpillère et la musique qui danse, affleurent une insondable tristesse, un spleen ultra-sensible, une magnifique nostalgie qui ne ment pas sur ses véritables intentions. Bien avant l’entêtante mais facile Ritournelle, le superbe Fantino tiré de son premier Album, « l’incroyable vérité », avait déjà donné le ton. Sofia Coppola ne s’y était pas trompée en le choisissant pour la BO de son « Lost in Translation ».
Bref vous l’aurez compris, je vénère le gourou bleu et je ne m’en cache pas. Sébastien jouera à Metz pour la dernière date de sa tournée, rendez-vous est pris pour un portrait. Le jour-J coup de fil en début d’après-midi, il y a un problème, Sébastien a mal dormi la nuit dernière, il veut se reposer après les balances. La photo est reportée après le concert. Là, c’est moi qui commence à me demander si j’aurai encore la pêche pour shooter à minuit… la réponse sera oui et dans sa loge. Youpi me dis-je ! …quand on pense Sébastien Tellier on pense dandy, piscine, champagne, filles de petite vertu, décadence et orgies en tout genre… finalement c’est dans un double Algeco de couleur beige clair éclairé par deux rangées de néons blancs que nous nous retrouverons. En guise de compagnie, un homme chauve non identifié, mais la table de salon fort encombrée laisse entrevoir qu’on a passé du bon temps et que ça n’est pas terminé. Comme je m’y attendais, le Maître est jovial, cordial, bavard et pris d’une incontrolable tendance à dire à peu près n’importe quoi. Pris dans le flot d’une conversation qui n’a pas de sens, j’en oublie de refaire ma mise au point lorsque je décide que finalement le mur de la boite d’acier fera un fond parfait pour l’énergumène. Pose gourou d’abord, puis je saisis un début de sourire et m’en félicite à voix haute, il m’offre alors un vrai faux rire ! Notre affaire réglée je cède prestement ma place aux collègues de la presse écrite qui trépignent de poser leurs questions. Mais ils ignorent alors que l’un des secrets les mieux gardés de l’alliance bleue vient de m’être révélé des lèvres même de l’intéressé. L’apôtre du Pépito bleu avait en fait un faible pour les Pim’s et venait de s’en envoyer trois boites, telle était en fait la cause de toute son agitation ! Je lui conseillais de ne pas en abuser, il confirmait !
Sébastien Tellier devrait sortir son prochain album en octobre prochain et l’on s’en réjouit !
Remerciements chaleureux à Pauline Husser sans qui cette rencontre n’aurait pas eue lieu.
